G. Bedouelle u.a. (Hrsg.): Concile Vatican II

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Titel
La réception du Concile Vatican II par les théologiens suisses / Die Rezeption des II. Vaticanums durch Schweizer Theologen,.


Herausgeber
Bedouelle, Guy; Mariano, Delgado
Reihe
Studia Friburgensia
Erschienen
Fribourg 2011: Academic Press
Anzahl Seiten
238 S.
Preis
URL
Rezensiert für infoclio.ch und H-Soz-Kult von:
Lorenzo Planzi

Quel est le rôle des théologiens suisses, du cardinal genevois Charles Journet au théologien réformé Karl Barth, pendant le concile de Vatican II? Et qu’en est-il de la réception de l’aggiornamento en terre helvétique? L’historiographie conciliaire se trouve désormais enrichie par le livre bilingue, en français et en allemand, sur La réception du Concile Vatican II par les théologiens suisses / Die Rezeption des II. Vaticanums durch Schweizer Theologen, sous la direction du père Guy Bedouelle et du professeur Mariano Delgado. A cinquante ans de Vatican II, le livre publie les contributions précieuses du symposium qui – en novembre 2006 à Fribourg – a réfléchi à cette problématique au croisement entre histoire et théologie, en répondant de façon exhaustive à ces interrogations passionnantes. Grâce à deux ordres de sources – c’est-à-dire les sources connues et publiées mais bien aussi les sources inédites, comme les notes, manuscrits et correspondances – ce volume reconstruit les rapports entre Rome et la Suisse dans les années 1962–65.

Le théologien suisse le plus en vue de l’époque est le Genevois Charles Journet – crée cardinal en février 1965 – dont les relations avec le concile sont explorées par l’article de Philippe Chenaux. L’apport du théologien romand, ami de Jacques Maritain, ne se limite pas à son intervention en faveur de la liberté religieuse comme un «développement» évangélique de la doctrine, mais passe surtout par la tribune intellectuelle dont il dispose à travers la revue Nova et Vetera: «La préoccupation fondamentale de Journet dans l’après-concile, qui traverse toutes ces interventions, me semble être celle de prévenir la mise en oeuvre d’une forme d’aggiornamento qui altérait la ‹substance› du message catholique» (21).

Les relations avec le concile d’un autre théologien suisse de grand renom, le Lucernois Hans-Urs von Balthasar – créé luiaussi cardinal, en 1988, mais qui meurt quelques jours avant d’en recevoir les insignes – apparaissent plus nuancées et «peuvent se comprendre comme un drame en trois actes et un épilogue» (111), comme l’observe l’évêque auxiliaire émérite de Coire, Peter Henrici. De la propagation de sa «nouvelle théologie» et de l’oecuménisme, Hans-Urs von Balthasar produit par la suite des écrits polémiques, mais à l’époque post-conciliaire – à travers la revue Communio – «il reconduisit ses efforts d’antan de transmettre une conception clairement christocentrique de l’Eglise et du monde» (111).

La genèse de Mysterium Salutis, document conçu à la fin des années cinquante par les théologiens suisses Johannes Feiner et Magnus Löhner comme une «dogmatique de l’histoire du salut» (178), est retracée par Mariano Delgado. Son analyse comparative avec l’ouvrage de Karl Rahner Aufriss einer Dogmatik invite le lecteur à se plonger dans les documents fondamentaux de l’époque conciliaire. Comme aussi les contributions sur les renouvellements introduits en Suisse dans les champs de l’exégèse (par Max Küchler) et de l’éthique théologique (par Walter Lesch), sans oublier les évolutions post-conciliaires dans l’Eglise et la société helvétique (par Rolf Weibel), entre innovations et controverses.

Le théologien le plus innovant et en même temps controversé est sans doute le Lucernois Hans Küng, dont l’engagement pour Vatican II est explorée par l’article de Leo Karrer. D’autres portraits de théologiens et hommes d’Eglises qui réfléchissent à la réception du concile en terre helvétique concernent le dominicain Henri de Riedmatten, représentant du Saint-Siège dans la vie diplomatique (par Paul Grossrieder); Jacques Loew, qui fonde à Fribourg l’expérience de l’«Ecole de la foi» (par Claude Ducarroz); et le canoniste tessinois Eugenio Corecco – futur évêque de Lugano entre 1986 et 1995 – qui concrétise ses idées «en plaçant la Faculté de Théologie de Lugano, qu’il a créée, sous le signe de l’amitié et du dialogue comme condition d’accès à une connaissance véritable qui associe organiquement savoir théologique et formation spirituelle, enseignement académique et expérience intérieure, vérité de foi et vie ecclésiale» (91).

L’amitié et le dialogue sont, suite à l’expérience conciliaire, au coeur des progrès de l’oecuménisme suisse. Les profils des pionniers du mouvement oecuménique en Suisse, du savant vieux-catholique Kurt Stalder au théologien protestant Klauspeter Blaser, sont illustrés par Guido Vergauwen. L’école dite «de Neuchâtel», représentée par Jean-Jacques von Allmen et Jean-Louis Leuba, prépare et accompagne plus de Vatican II, comme en témoigne l’article de Gottfried Hammann, tandis que Thomas K. Kuhn se penche sur les rapports conciliaires du théologien protestant Oscar Cullmann.

Le grand théologien réformé Karl Barth manifeste lui-aussi une attention lucide aux travaux de Vatican II. Son ombre plane sur les discussions romaines, comme l’observe Gilles Routhier dans son essai. En s’émerveillant devant le souffle du concile, Barth s’interroge sur certaines attitudes des autres Eglises chrétiennes: «Pour une fois, c’est nous, les chrétiens non romains, qui sommes interrogés de manière spéciale. De grâce: on ne nous demande pas si nous pourrions, devrions ou voudrions devenir catholiques; la question porte sur ce qui devrait être susceptible de bouger – ou non – en ce qui nous concerne, dans l’espace de notre Eglise, de façon correspondante» (43). Et encore: «Si Rome nous surpassait, et nous effaçait simplement un jour, en ce qui concerne le renouveau de l’Eglise par la Parole et l’esprit de l’Evangile? Si nous devions voir que les derniers seront les premiers et les premiers seront les derniers? On pourrait imaginer que nous ayons à apprendre de l’Eglise romaine – non pas de ses doctrines particulières, ni de ses formes cultuelles et autres institutions, mais de l’esprit nouveau qui vivifie et anime ses ossements»(43).

Tous ces profils, témoignages, documents nous ouvrent une fenêtre inédite sur les rapports de la Suisse, et de ses théologiens, avec Vatican II. Le livre dirigé par Guy Bedouelle et Mariano Delgado, qui ouvre des nouvelles pistes de recherche, nous témoigne que plusieurs théologiens suisses prennent une part décisive dans l’aggiornamento, tout en étant en même temps les protagonistes d’importantes discussions et confrontations théologiques.

Zitierweise:
Lorenzo Planzi: Rezension zu: Guy Bedouelle/Mariano Delgado (s.l.d.), La réception du Concile Vatican II par les théologiens suisses / Die Rezeption des II. Vaticanums durch Schweizer Theologen, Fribourg, Academic Press/Editions Saint- Paul (Studia Friburgensia), 2011. Zuerst erschienen in: Schweizerische Zeitschrift für Religions- und Kulturgeschichte, Vol. 107, 2013, S. 480-482.

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